Il y a deux façons d’appréhender le football.
Deux visions de ce jeu.
Et c’est ainsi depuis qu’un beau jour, un ballon se mis à rouler sur les pelouses du monde entier.
Il doit bien en exister une troisième car dans la complexité tout marche toujours par trois! Mais s’il devait y en avoir une, ce serait certainement celle de s’en foutre royalement. Et comme, sur ce blog, nous avons décidé de nous y intéresser, allons voir ce qui se cache derrière les deux autres.
La première est celle qui considère le jeu football comme une lutte, une bataille, un affrontement. Il lui faut les meilleurs soldats, des joueurs puissants, rapides, techniques, endurants.
Son modèle de jeu: gagner les duels.
La seconde, comme pour y échapper, le voit comme un jeu d’évitement. Elle nécessite des joueurs dynamiques, vifs, habiles, intelligents. Pour elle, le jeu est une aventure. Il lui faut des chevaliers, des chercheurs, des vagabonds, une bande de copains…
Son modele de jeu: éviter les duels.
La première est une espèce de rugby qu’avec les pieds.
La seconde, un pris-pris avec un ballon.
Pour les soldats c’est: en avant soldats!
Leur direction : vite, vers l’avant, vite et vers l’avant!
La bande de copains, sait que la recherche du but en ligne droite, l’amènera à un choc sévère, à une agitation et à la perte du ballon.
Leur cheminement est imprevisible. On dit qu’il est chaotique. C’est pourquoi, pour avancer, ils reviennent en arrière. Ils ne recherchent pas le but adverse et c’est pourquoi, le but adverse peut se présenter à eux.
Les soldats sont préparés.
Les autres improvisent car la seule chose qu’ils organisent c’est ce qui se passe avant le match et ce qui se passe après le match. Ce qui se passe sur le terrain … les circonstances l’organiseront et l’imprévu le décidera. Eux le savent très bien. C’est pourquoi on dit d’eux qu’ils sont imprévisibles.
Quand les premiers hurlent: dure, dure! ; les seconds chantent: ensemble, ensemble!
Les uns s’imposent et les autres s’affirment.
Les uns agissent, les autres interagissent.
Les uns sont agressifs, les autres, inventifs.
Les soldats, tels les esclaves de l’île de Goré, sont enrôlés, recrutés par des négriers. Ils sont interchangeables.
Les autres, parce qu’ils sont tous uniques, se sélectionnent naturellement par affinité. On dit qu’ils sont camaraderie.
Les soldats analysent, élaborent et planifient des plans, des tactiques. Ils sont causes et conséquences.
Le football des autres aussi contient des tactiques. Beaucoup même! Autant que possible, une pour chaque action. Et non pas une pour chaque match. Mais toutes dans leur moment, imprévues. Ils savent que ce qui est valable à un moment, ne l’est plus à l’instant suivant. C’est pourquoi ils peuvent vivre et jouir de l’instant présent.
Les soldats sont sérieux.
Eux sont joyeux. Pour eux, le sérieux est incompatible avec le jeu. Ou avec jouer. Parce que pour eux, jouer est, dans une certaine mesure céder la place à l’irresponsable. C’est pourquoi ils peuvent créer librement de façon inattendue.
Deux façons de voir le jeu football. Deux football.
Une est une vision mécanique et analytique.
L’autre, organique et complexe.
Deux visions!
D’un football à l’autre, d’un jeu à l’autre, fouillons, creusons, approfondissons!
L’un est dévouement et l’autre est engagement.
L’un est logique.
L’autre est intuitif.
L’un est raison.
L’autre, imagination.
L’un a les moyens de son ambition.
L’autre, une juste intention.
L’un est professionnel et l’autre est passionnant.
L’un s’analyse, l’autre se contemple.
L’un est scientifique.
L’autre, artisanal.
L’un est pragmatique et l’autre est romantique.
L’un est mathématique.
L’autre est indéchiffrable.
L’un est comptable.
L’autre, conteur.
L’un applique des formules. On peut dire de ses joueurs qu’ils sont appliqués.
L’autre développe des principes. On dit de ses joueurs qu’ils sont impliqués.
L’un ne prend pas de risque. Il est défensif.
L’autre est courageux. Il est protagoniste.
L’un forme, l’autre transforme.
L’un s’enseigne, l’autre se suscite.
L’un pleur les défaites et se pavane des victoires.
Pour l’autre, la défaite comme la victoire ne sont que deux vulgaires imposteurs.
L’un est moderne.
L’autre traverse les temps dans la mémoire des âmes.
On le dit éternel.
Deux football?
Deux visions?
Entre les deux, les cœurs se balancent des injures.
La première semble avoir pris le contrôle du marché et gagné les esprits des petits comme ceux des grands et, tous les samedis, ce sont des hordes de petits bataillons que nous voyons défiler sur et en dehors des terrains. Elle pense avoir vaincu, mais elle n’a pas convaincu car entre les pluies d’insultes, entre les salves de tricherie et les rafales de coups, on croirait assister à un exercice de préparation à un nouveau match de la mort.
En réalité, elles sont comme les deux faces d’une même pièce. Comme le ying et le yang, Elles s’influencent réciproquement, s’alimentent, s’équilibrent l’une et l’autre. Les deux gagnent et perdent des matchs, des championnats, des tournois… les deux de façon assez proportionnelle. Elles sont le corps et l’esprit de ce jeu.
D’un jeu à l’autre, les visions sont déséquilibrées. La nôtre penche vers la seconde mais nous nous laissons parfois inviter à vagabonder sur les rives de la troisième.
Les illustrations sont reprises du légendaire « Match de la mort » qui s’est déroulé le 9 Âout 1945.
Inspiré et parfois même directement traduit de « Football, dynamica de lo impesado » de Panzeri.